La vie est un éternel recommencement diraient certains, mais normalement on apprend de ses erreurs pour faire mieux la fois suivante. Ça c’est la théorie, quand il s’agît des décisions du gouvernement et des institutions au sens large, j’aurais plutôt tendance à dire que le recommencement ne permet que de mettre plein phare sur la médiocrité de la réflexion d’une élite parfaitement déconnectée de la réalité.
Vous l’aurez compris si vous avez l’habitude de me lire, aujourd’hui c’est encore un petit billet d’humeur que je partage avec vous. Et non, ce billet ne concerne toujours pas l’affaire des 80 km/h que je me garde encore sous le coude. Ici j’avais plutôt envie de parler de la sous-estimation « informatique » récurrente et leur dysfonctionnement systématique, que cela concerne le nouveau système des cartes grises ou les stationnements urbains pour lesquels les polémiques enflent aussi bien à Paris qu’en province.
Plantage en beauté du service des cartes grises
C’est ici le parfait exemple d’un service lancé à la va-vite, ou plutôt de l’arrogance de certains services reposant sur une facturation sûrement monstrueuse d’applications informatiques devant en théorie pouvoir absorber le flux des demandes. Léger couac, c’est qu’il aurait peut-être fallu tester celui-ci à grande échelle avant son lancement en grande pompe et un plantage tout aussi magistral.
Le plantage est d’autant plus visible que la mesure s’accompagnait d’une fermeture des services traditionnels en préfectures, autant dire qu’avant même le lancement effectif cela s’annonçait comme un gros fail, et ça n’a pas loupé.
Mais l’état a la mémoire courte, c’est pourtant un problème récurrent du lancement de services dématérialisés. Pour ceux qui ont télé-déclarés leurs impôts (comme moi) dès les premières années s’en souviendront probablement (même si cela remonte à pas mal d’années maintenant), généralement quand arrivait la date limite pour remplir sa déclaration d’impôts sur le revenu, il devenait quasi impossible de se connecter au site concerné sauf éventuellement à être insomniaque, car le service n’était pas trop saturé entre 2h et 6h du matin. Le reste du temps c’était de la pure loterie, il a fallu 2 à 3 ans pour que la surcharge (lié au pic des retardataires) soit absorbée par des services informatiques redondants et suffisamment dimensionnés pour gérer la charge.
Dans le cas des cartes grises (SIV) en plus d’une demande informatique trop importante pour être traitée après soumission dans des délais raisonnables, les cas spéciaux ont été les grains de sable qui ont enrayés les engrenages de tout le système. Impossible de faire immatriculer un véhicule d’import à partir de la mi-novembre, les plaques ww ont été bloquées, passer de l’ancien format de plaque à l’actuel (1234 ABC 75 > AB-123-CD) était impossible, et si certains professionnels ont réussis à faire passer des demandes d’immatriculations classiques, certains se sont retrouvés avec une flotte de véhicules impossible à livrer aux clients. Et les plus grands perdants de l’histoire sont les particuliers pour lesquels même la cession de véhicule (vente entre particuliers) était quasiment impossible à déclarer… un bordel sans nom pouvant causer beaucoup d’ennuis aux propriétaires.
Ce n’est pas comme si la période de fin d’année était généralement chargée pour les immatriculations (notamment quand le malus vient mettre une petite claque à certains modèles et que les constructeurs immatriculent en masse pour sauver les chiffres) … mais non voyons !! changeons le système à cette période là et fermons les bureaux physiques qui pourraient traiter manuellement les cas spéciaux. Finalement face au constat de dysfonctionnements massifs du système (il aura quand même fallu plusieurs semaines), les dits-bureaux ont été ré ouverts en attendant que le système se débloque, mais sans forcément pouvoir résoudre tous les cas en attente dans les limbes informatiques et administratives.
C’est donc plusieurs dizaines de milliers de cartes grises qui ont été (ou peut-être sont encore) en souffrance sur le système de l’ANTS (Agence Nationale des Titres Sécurisés). Vous savez c’est le même service qui gèrent en plus d’un mois la moindre demande de passeport, de CI et ne parlons pas du renouvellement des permis de conduire.
Je suis plutôt favorable à la dématérialisation des services d’immatriculation, car pour tous ceux qui ont perdu leur temps en préfecture c’est quand même plus agréable de pouvoir le faire depuis chez soi sur Internet, enfin si cela fonctionne (moi à vrai dire je suis souvent passée par un courtier ou par courrier histoire de m’éviter ce merdier).
Là où ils se sont plantés en beauté c’est qu’ils auraient dû lancer le service en gardant en parallèle le circuit traditionnel, les deux services auraient dû cohabiter pendant plusieurs mois (et même jusqu’à un an), ce qui aurait permis de détecter les dysfonctionnements du site et de les réparer sans paralyser une bonne partie du système empilant les demandes dans une liste sans fin avec des délais de traitement impossible à connaître à l’avance (plusieurs semaines pour une bonne partie des particuliers et certains pros).
Stationnements urbains : des horodateurs HS, des agents verbaliseurs foireux et des tarifs incompréhensibles
C’était sûrement la pilule la plus difficile à avaler début janvier pour les habitants des grandes villes françaises, Paris en tête de liste mais on n’est même plus surpris par les mesures visant à chasser l’automobile, mais cela concerne également les villes de province avec autant de nouvelles réglementations du stationnement de surface qu’il y a de ville.
Et dans cette cacophonie des changements du 1er Janvier 2018, certaines villes remportent la palme du plus beau plantage. Tours notamment qui a carrément dû retropédaler dans un premier temps (en activant une gratuité pour tous) tellement les dysfonctionnements et l’incompréhension du contribuable étaient importants.
Pour ceux qui sont un peu extérieurs à tout ça (vive la campagne) je fais un rapide récapitulatif, chaque ville a depuis le 1er janvier 2018 la possibilité de modifier l’amende (forfait post-stationnement – FPS) qui est infligée à l’automobiliste en cas de dépassement de son temps de stationnement. Du coup certains maires ont sauté sur l’aubaine pour compenser les baisses de dotations de l’état par de l’argent en direct de ses contribuables (de toute façon dans les deux cas on est plumé) et des touristes. Sachant que cette amende (enfin forfait) s’accompagne en plus de changements de règles sur les tarifs des stationnements…
Nos chers élus ont considéré que pour augmenter le taux de rotation des véhicules sur les places de surface il fallait dissuader les particuliers de rester globalement plus de 2 heures en stationnement dans les centres villes…. Enfin ceci dit cela varie beaucoup d’une ville à une autre… mais globalement sauf Nice et quelques autres, c’est la douche glacée ailleurs.
Généralement passé deux heures en zone d’hyper centre dans bon nombre de villes comme Lyon, Bordeaux, Strasbourg, vous payerez de toute façon l’équivalent du FPS (35€ par-ci, 60€ par là), surtout que comme maintenant ce sont des agents privés qui ratissent les villes à la recherche du rendement maximum vous ne pourrez pas y couper à la moindres minute dépassement (c’est un système sûrement emprunté à nos voisins espagnoles)… alors là j’ai juste envie de sortir un GIF animé qui applaudit avec mépris car si les autorités avaient décidé de précipiter la désertification des centres villes, ils auraient pas pu mieux s’y prendre…
Si on n’a pas besoin de 2 heures pour acheter du pain ou un bout de fromage, bon nombre de mes déjeuners en ville pour le business durent aussi plus longtemps que 2 h (de voiture à voiture en plus), la seule fois dans l’année où je suis susceptible de passer chez le coiffeur ça me prend plus que 2h, aller voir un médecin ou un spécialiste avec le retard qu’il a pris sur son planning, visiter un musée ? il va falloir surveiller la montre (tic tac tic tac)…. alors ne songez pas à vous arrêter à la boutique de souvenirs ou à vous poser pour prendre un café en terrasse pour vous reposer. Les séances de shopping en ville (période des soldes ou non) sont aussi à proscrire si vous avez l’habitude de vous stationner dans les rues de votre ville, alors que dire d’aller au ciné ou au théâtre…
On vous pousse dans ces cas là à utiliser les parkings privés (nos « chers » Vinci & co) ou des parkings hors de la ville (genre P+T pour les villes équipées de tram), mais comment savoir si la course ou le déjeuner qui devait durer moins d’une heure ne va pas s’éterniser un peu … attention la sanction est sévère et implacable.
Selon moi on va surtout définitivement faire fuir les rares badauds déambulant en centre ville pour le plaisir de flâner et les emmener à la place vers des zones commerciales insipides où les parkings sont gratuits… Alors je ne dis pas bravo à ces grandes villes qui pensent que leur offre de parkings « autres » (que surface) peuvent accueillir tout le stationnement dépassant 2h, en étant suffisamment dimensionné, car en prime vous vous mettez encore le doigt dans l’oeil. Les premiers qui vont pâtir de cette mesure c’est les commerces du centre ville qui sont pourtant le poumon et l’âme des villes.
Bref je pourrais parler pendant des heures de l’incohérence entre les tarifs de stationnement et l’attractivité du centre ville. Mais revenons un peu sur les bugs, je parlais tout à l’heure des habitants de Tours pour lequels le système a carrément été désactivé jusqu’à nouvel ordre, mais pour le coup c’est les parisiens qui sont aussi le parfait exemple de la connerie du système. Deux sociétés privées se partagent le marché de la verbalisation, et un peu comme pour les services de fourrière on peut dire qu’ils ont les dents qui rayent le plancher (et le QI d’une huître… désolé pour les huîtres). Ils sont tellement avides d’atteindre voire de dépasser des objectifs chiffrés improbables qui verbalisent à tour de bras y compris les véhicules qui ne sont pas en infraction.
Ainsi des parisiens (ou franciliens) ont reçus des FPS alors qu’ils étaient encore bon dans la période qu’ils avaient payé. A partir du moment où la société privée ne pouvait consulter les règlements fait en ligne (une bonne partie du temps apparemment), ils mettaient la contravention, au conducteur dans son bon droit de perdre du temps pour faire une réclamation avec preuve(s) (enfin si le site mis en place fonctionne, ce qui n’est pas vraiment le cas vous vous en doutez … il est surchargé !!). Ils ont aussi aligné tous les véhicules sans distinction médecin, policier (avec voiture sérigraphiée), PMR … tout le monde a été logé à la même enseigne …
On a donc à Paris trois problèmes vis à vis de ces FPS : le premier c’est que le système équipant les agents chargés de contrôler les véhicules ne fonctionne pas correctement (premier bug), le second vient de l’humain qui bug littéralement (une même voiture a quand même été verbalisée dans deux rues différentes à 2 minutes d’intervalle… en plus ils sont apparemment un peu allergiques à la pluie, incapables de reconnaître une marque d’une autre, parfois drogués ou sans permis et absolument dénués de toute intelligence ou compassion… ), le troisième vient du système pour payer et / ou faire une réclamation qui est complètement saturé (et ne permet même pas de payer l’amende minorée dans la plupart des cas faute de pouvoir s’y connecter)…. bah oui ce dernier point aurait mérité une mise en place progressive avec une zone de test limitée… mais faut pas trop en demander…
Tant que l’on n’est pas victime de ce racket (mal) organisé on peut encore en rire, mais on en rit quand même un peu jaune … bon courage à tous ceux qui hélas habitent dans les villes concernées par ces nouveaux FPS délirants ainsi que ceux qui se sont arrachés les cheveux avec le système SIV mis en place par l’ANTS pour les cartes grises… je vous envoie pleins de pensées positives…
Et dire qu’ils veulent nous faire croire que les contrôles radars (mobile mobile) privatisés sont pour notre sécurité et sans objectif de rentabilité max (pour les sociétés privées)… ah ah ah (à relire : beaucoup de questions autour de la privatisation des radars mobiles mobiles)